Quatre ans après It Takes Two, élu jeu de l’année en 2021, Josef Fares va-t-il faire un doublé avec Split Fiction ? Le papa de Brothers et A Way Out revient avec les équipes de Hazelight pour une nouvelle aventure détonante, toujours à vivre en duo. Cette fois, ce sont deux héroïnes qui vous donnent rendez-vous pour tester à la fois votre cohésion et peut-être même votre amour du gameplay.
Et si vos idées prenaient vie sous vos yeux sous forme de simulation, comme dans un jeu ? C’est ce que vous propose d’imaginer Split Fiction. Exit les évadés ou le couple en crise, Josef Fares vous propose cette fois d’incarner Mio et Zoé. Ces deux autrices aux univers littéraires diamétralement opposés se retrouvent prises au piège d’un monde virtuel que leur cohabitation inattendue détraque totalement… Entre science-fiction cybernétique et fantasy flamboyante, naviguez en coopération en duo pour parvenir à retrouver votre liberté. On a testé le nouveau jeu d’Hazelight avant sa sortie le 6 mars prochain sur PC, Xbox Series et PS5. Le génie du studio est-il toujours aussi brillant ? Voici notre verdict.
Split Fiction, une folie virtuelle à deux
Fidèle à sa tradition, Hazelight Studios propose une nouvelle aventure qui se vit en duo dans Split Fiction. En coopération en écran partagé, nous incarnons donc deux protagonistes : Mio Hudson et Zoé Foster, toutes deux sont des autrices passionnées qui rêvent d’être enfin publiées, mais dont les univers sont très différents. La première est fan de science-fiction, tandis que l’autre préfère la fantasy. Qu’importe, toutes deux ont tapé dans l’œil d’une entreprise. Celle-ci leur donne l’opportunité de faire naître virtuellement leurs idées grâce à une machine spéciale qui les place à l’état de stase pour explorer leur esprit… Sauf que le moment venu, tout ne se passe pas comme prévu ! Coincées ensemble dans la simulation, leurs histoires se mélangent. Elles se retrouvent alors obligées de coopérer pour s’en extirper.

Après A Way Out, c’est donc une nouvelle évasion qui nous attend avec Split Fiction. Nous voilà immergé au cœur des différentes fictions que Mio et Zoé imaginent depuis des années. Mais vous vous en doutez, l’univers de l’une ne plaira pas vraiment à l’autre. Malgré leur tempérament aux antipodes, elles vont devoir s’adapter à un environnement qui leur est étranger. En même temps, c’est ainsi qu’elles vont se découvrir mutuellement. Hazelight exploite les codes des genres fictionnelsficitonnels prédominants pour façonner ses héroïnes : science-fiction cyberpunk froide mais électrisante d’un côté à la cyberpunk d’un côté, fantasy lumineuse et drôle façon Hobbit de l’autre. À chaque nouveau fragment d’histoire qui se dévoile, c’est leur personnalité qui éclate à l’écran.
De prime abord, cette peinture des héroïnes est archétypale. On se retrouve une fois de plus devant l’opposition entre la pragmatique plutôt renfrognée et la rêveuse empreinte de naïveté. Même dans l’ensemble, le scénario global est relativement cousu de fil blanc. Certains événements sont d’ailleurs prévisibles à des kilomètres, ce qui pourrait nous laisser en retrait. Cela dit, jouer sur des modèles éculés est aussi une matière de capter facilement notre attention pour nous emmener là où le jeu le souhaite. Ainsi, si l’histoire générale est souvent prétexte à nous replonger dans le gameplay, parfois avec des transitions maladroites entre deux changements d’univers, elle nous tient tout même en haleine en ne dévoilant pas trop vite les raisons pour lesquelles nos héroïnes sont véritablement là où elles sont aujourd’hui.
Une fois de plus, Hazelight prouve que son talent de narrateur passe en grande partie part les phases de jeu. Plus que la grande trame de Split Fiction, ce sont ses récits enchâssés qui nous happent. Chaque incursion dans l’imaginaire de l’une ou l’autre des protagonistes est une façon d’explorer sa psyché. Les décors qui défilent sont autant de fenêtres ouvertes sur leurs rêves et leurs angoisses. Sans compter les histoires annexes à découvrir dans chaque niveau. Elles sont plus ramassées, mais ne manquent pas moins de panache avec leur mise en scène aussi épique que farfelue. Certaines sont même les plus mémorables du jeu, c’est dire !

En fin de compte, on réalise qu’il y a aussi du It Takes Two dans Split Fiction. Le jeu questionne la manière dont deux deux personnalités dysfonctionnelles à première vue peuvent trouver un terrain d’entente. Malgré les a priori, cette plongée forcée dans le monde de l’autre est une manière pour Mio et Zoé de s’apprivoiser. Ainsi, Hazelight tend à montrer qu’avec un but commun, on peut passer outre les différences pour apprendre à s’entendre, voire s’apprécier. Le fond de la métaphore est convenu, mais cela fonctionne bien dans la pratique.
De l’autre côté de l’écran, la magie opère là aussi. C’est à nous de collaborer pour faire avancer le duo dans son périple tout en appréciant la générosité de Hazelight dans la construction de son univers. Split Fiction regorge d’eEaster eggs et de références à tout-va, au cinéma comme au monde vidéoludique. Ma partenaire de vie ayant accepté de devenir ma partenaire de jeu pour ce test, j’ai pris autant de plaisir à réagir en même temps qu’elle a une référence à Assassin’s Creed ou à Blade Runner, qu’à l’écouter me partager les anecdotes qu’elle repérait ou lui partager les miennes. « Tiens, tu as vu ? Ça c’est du Akira ! Oh, mais c'est un niveau de Donkey Kong ! », et j’en passe. Au-delà de la narration, au-delà de son titre (« Fiction scindée »), Split Fiction nous rassemble. On s’émerveille à deux et, tout comme Mio et Zoé, on apprend encore plus à se connaître par ces petites touches qui invitent au dialogue. Et communiquer, c’est un peu la clé pour arriver au bout du jeu !
Les maîtres du gameplay sont de retour
Le retour au plaisir pur du jeu est plus que jamais dans l’air du temps ! Après le succès d’Astro Bot l’an dernier, 2025 sera clairement l’année de Split Fiction. Le nouveau jeu de Hazelight s’impose comme une expérience coopérative particulièrement imaginative qui a tout pour plaire à celles et ceux qui aiment jouer autant pour le fun et les sensations que l’émerveillement et la réflexion. It Takes Two avait déjà été porté aux nues pour son ingéniosité et les équipes n’ont pas perdu la main depuis. Une nouvelle fois, elles montrent comment le gameplay peut entrer au service de la narration tout en se renouvelant continuellement. Plutôt que de s’appesantir sur des gimmicks constants, chaque niveau crée la surprise avec des mécaniques bien à lui !
En soi, le jeu s’appuie essentiellement sur des mécaniques de bases classiques du médium vidéoludique. Seulement, vous connaissez Hazelight. La force du studio, c’est sa fertilité. Il parvient à concevoir un gameplay riche et varié, aussi bien lorsqu’il s’agit d’exploiter simplement des tirs, des sauts, doubles sauts et autres dashes que de découvrir des interactions nouvelles avec l’environnement. Ainsi, vous ne sauterez pas de la même manière dans un niveau que dans un autre, car vous n’aurez peut-être pas la même forme. À moins que vous ne vous retrouviez la tête en bas, dans ce cas il faudra jouer avec la gravité pour passer les obstacles. Et si on vous donnait la possibilité de voler, le feriez-vous plutôt avec un vaisseau ou… grâce à vos pets ? Tout devient possible dans le monde de Split Fiction et c’est ce grain de folie qui le rend aussi rafraîchissant !

Il faut dire aussi que Hazelight a le sens du rythme. Le jeu jongle habilement entre des séquences effrénées et d’autres plus calmes, offrant une bonne respiration entre deux passages intenses. Par exemple, vous serez embarqué dans une course-poursuite à moto ou bien contraint d’empêcher une explosion solaire dans un temps imparti. Dans un autre niveau, vous aurez tout le loisir de vous balader pour ramasser des pommes ou encore de prendre le temps pour trouver comment articuler les compétences respectives de Mio et Zoé afin de les faire progresser dans un niveau. Et ce n’est là qu’une part de la créativité du studio. Il n’hésite pas non plus à vous faire changer de perspective ponctuellement. Si vous restez à la troisième personne tout du long dans des environnements à explorer principalement en 3D, vous aurez quelques passages en 2D façon side-scroller. Enfin, pour couronner chaque fin de “chapitre”, c’est un combat en arène qui vous attend face à des boss qui, eux, ne vous laisseront pas de répit ! Suivant un modèle bien établi de combat en étapes, ils vous demanderont de mettre à profit vos capacités du niveau pour en revenir à bout. Réflexe et attention seront donc de mise, mais pas seulement.
Le cœur du gameplay de Split Fiction est évidemment la collaboration. Ajuster son timing, savoir s’attendre mais aussi communiquer sont la clé pour traverser les épreuves à deux et voir le bout du chemin. Chaque niveau est une nouvelle occasion de tester votre cohésion. Tout comme Zoé et Mio, à vous de réussir à former une bonne équipe avec votre complice de jeu ! C’est là aussi qu’on apprécie le fait de jouer en duo. En alliant nos regards et en travaillant de concert pour pallier les failles de l’autre avec nos atouts propres, ma conjointe et moi avons pu créer la symbiose nécessaire pour traverser les niveaux et aller au bout de l’aventure. Après tout, c’est ça que cherche Split Fiction : créer une harmonie entre deux personnages très différents — et les personnes au bout des manettes — pour passer chaque obstacle et en sortir plus fort à deux.

Il est bon de noter en outre que Split Fiction est loin d’être un jeu punitif. Certains passages vous demanderont un peu plus de réflexion ou d’adresse, mais avec deux cerveaux concentrés sur l’aventure, nul doute que vous vous dépêtrerez de toutes les situations. D’autant plus que si vous vous loupez, les checkpoints sont suffisamment rapprochés pour voaus permettre de progresser même dans les moments plus complexes. Pour couronner le tout, il bénéficie de plusieurs fonctionnalités d’accessibilité, comme le remappage des touches, l’aide à la caméra ou tout simplement la réduction des dégâts infligés par les ennemis. Avec ce nouveau jeu, Hazelight n’est pas là pour vous mettre en échec, au contraire. Le gameplay a été pensé pour vous proposer du challenge bien jaugé pour que le plaisir de jeu prime avant tout.
Une performance et une esthétique au service du jeu
L’efficacité du gameplay de Split Fiction ne pourrait pas être ce qu’elle est sans une technique bien huilée. Pour l’avoir testé sur PS5, le jeu est d’une fluidité sans faille, a fortiori en 60 FPS. Autant cela peut paraître un détail dans certains niveaux plus calmes, mais lorsque l’action est au rendez-vous, c’est évident que la maîtrise du support joue un rôle primordial dans l’exécution. Sans bug à déplorer, sans ralentissement notable, l’expérience peut se savourer pleinement.
Cela a aussi été rendu possible par le fait de jouer dans des niveaux linéaires pas trop longs. On avance généralement de zone en zone, ce qui permet de ne pas avoir à charger trop d’éléments et donc d’avoir un rendu optimal. Ainsi, les jeux de lumière sont excellents, même les passages bien remplis ne rencontrent pas de problèmes. Hazelight se permet en plus de jouer sur les effets de grandeur et de profondeur dans certains niveaux spécifiques pour nous immerger complètement dans ses univers et ça marche du tonnerre !
Qui plus est, le studio montre sa maîtrise des genres jusque dans sa direction artistique. Même en alliant deux genre fictionnels opposés, Hazelight parvient en retranscrire tout un tas de nuances. Ainsi, les mondes de Mio tournent autour de la Sci-Fi, mais sous plusieurs facettes. On passe de villes futuristes très cyberpunk où les voitures volantes navigues entre les grattes-ciel illuminés, à des vaisseaux spaciaux plus austères mais voire inquiétants... Quant à Zoé, son univers se teinte de villages médiévaux remplis de trolls. Puis, on débouche dans une forêt luxuriante digne des Kokiri de Zelda, où la magie et les pouvoirs de la nature priment sur toute idée de technologie. L'ensemble cohabite à merveille dans un style graphique semi-réaliste qui rend honneur à la fois au jeu en lui-même, mais aussi aux genres dans lesquels il nous transporte.
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© AUR pour Gameblog. -
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Le tout est en plus porté par une bande-son qui s’adapte à merveille aux différents thèmes et aux séquences aussi bien explosives que plus reposantes. On regrettera peut-être qu’il n’y ait pas de thème véritablement marquant, qui nous suivrait au-delà de l’aventure. À défaut, on retiendra le doublage bien mené en VO comme en VF ! L’essentiel des dialogues est porté par le binôme que forment Mio et Zoé et elles s’en sortent très bien. Les échanges sont naturels, crédibles et ne manquent pas d’émotion. Tout cela contribue à faire qu’on s’attache à ce duo et qu’on a envie d’aller au bout de l’aventure avec elles.